Au commencement il n'en était pas ainsi (Matthieu 19: 3-8; Genèse 2: 18-25)

W. Runkel

Les paroles de l'évangile de Matthieu citées ci-dessus ont été prononcées par le Seigneur lors d'un entretien avec les pharisiens au sujet du mariage et du divorce. Nous désirons les méditer, ainsi que celles de la Genèse que le Seigneur rappelle. Elles sont des plus actuelles aujourd'hui.

«Est-il permis à un homme de répudier sa femme pour quelque cause que ce soit?» — telle est la question que posent ces hommes. Comme bien souvent, leur motif n'était pas le désir de recevoir une instruction divine; ils n'avaient d'autre but que de tendre un piège au Seigneur Jésus. La loi avait en effet accordé la possibilité de répudier sa femme sous certaines conditions. Le Seigneur leur dit que Moïse l'avait permis à cause de leur dureté de cœur — «mais au commencement il n'en était pas ainsi» (Matthieu 19: 8). Leur piège était déjoué. Le Seigneur ne connaissait que trop bien leurs cœurs et discernait leurs intentions.

Ce qui nous frappe ici, c'est le manque d'intelligence de ces hommes. Ils connaissaient bien les Écritures, mais ils n'avaient jamais été touchés par elles dans leur conscience. Ils n'avaient pas compris que le mariage devait être protégé par la loi, et que les ordonnances de celle-ci relativement aux relations humaines ne constituaient que ce que l'on pourrait appeler une exigence minimale. Ainsi, le sens profond et élevé du mariage leur restait caché. Si les pharisiens avaient reconnu le Seigneur comme étant le Fils de Dieu, ils auraient vite compris que Celui qui leur parlait était en mesure de révéler et d'expliquer la plénitude des pensées de Dieu. Mais leur «entendement» demeurait «obscurci». Ils étaient «étrangers à la vie de Dieu à cause de l'ignorance qui est en eux, à cause de l'endurcissement de leur cœur» (Éphésiens 4: 18).

Quand, dans le Nouveau Testament, il s'agit de questions du domaine de la création et de la vie naturelle de l'homme, le Saint Esprit remonte souvent à l'origine ou au commencement, au moment où Dieu a établi les choses dans un ordre qui correspond à sa pensée. C'est ce que le Seigneur fait dans cet entretien avec les pharisiens. Il parle de ce qui nous est rapporté en Genèse 2 au sujet de l'institution du mariage, dès que Dieu eut créé l'homme et la femme. Dans ce chapitre, nous trouvons trois points ou trois principes qui, dans leur application pratique, peuvent nous servir de fil conducteur:

  1. ce que Dieu s'est proposé (verset 18);
  2. ce que Dieu a fait (verset 22);
  3. ce que Dieu a ordonné (verset 24).

Ce que Dieu s'est proposé (Genèse 2: 18)

Dieu avait donné à Adam l'ordre de cultiver et de garder le jardin d'Eden. L'homme a aussi reçu la tâche de donner des noms aux animaux. Toutefois il était solitaire. Alors Dieu, pour ainsi dire, nous entrouvre son cœur: «Il n'est pas bon que l'homme soit seul; je lui ferai une aide». Ces paroles révèlent quelque chose de ses desseins: Christ et l'Assemblée devaient un jour former une merveilleuse unité dont le mariage est une image. Quel Dieu merveilleux! Il fait participer l'homme à ses desseins.

Le fait que Dieu prenne connaissance de la solitude de l'homme parle à nos cœurs. Il a vu qu'Adam n'avait autour de lui que des animaux; il n'y avait aucune créature avec laquelle il puisse entretenir une relation intérieure. Personne ne connaît comme Dieu les besoins profonds de l'homme. C'est lui qui l'a formé: esprit, âme et corps. Notre Sauveur aussi, qui est venu comme un étranger céleste dans un monde de péché, a connu sur cette terre ce que signifie la solitude. N'a-t-il pas dû, peu avant sa mort, dire avec tristesse à ses disciples: «Vous me laisserez seul» (Jean 16: 32)?

Mais il y a aussi la consolation de savoir qu'il est à même de sympathiser avec ceux qui, parmi les siens, sont solitaires. Dans le dessein de Dieu, le mariage était la chose normale, et le célibat l'exception. A cause des tragiques conséquences du péché qui est entré dans la création, le dessein de Dieu de rendre l'homme heureux dans le mariage n'est plus réalisé de la manière dont il se l'était proposé. Et nous pouvons aussi nous demander si nous sommes encore en mesure de sympathiser avec ceux qui doivent souffrir de la solitude; si nous sommes encore capables, au moins dans une mesure, de souffrir avec eux.

Cependant, si nous parlons des desseins divins en relation avec le mariage, soyons bien conscients que pour chacun de nous personnellement, Dieu a un dessein quant à notre vie sur la terre. Et il est de la plus haute importance que nous ne fassions pas obstacle à ce plan divin et sage. Relativement au mariage, cela signifie: laisser le choix à Dieu. Dieu savait exactement ce qui manquait à Adam pour l'accomplissement de sa tâche et pour la réalisation de son bonheur. Il savait quelle devait être celle qui pouvait être une aide pour lui. Et ainsi, il a formé à son intention «une aide qui lui corresponde», c'est-à-dire qui le complète. Soyons bien convaincus qu'aujourd'hui encore, Dieu sait ce qui nous correspond — qui convient à qui. D'où l'absolue nécessité, si nous envisageons le mariage, de rechercher auprès de Dieu conseil et direction.

Lorsqu'il dut aller chercher l'épouse pour Isaac, le serviteur d'Abraham a demandé à Dieu qu'il lui montre quelle était la femme qu'il avait destinée au fils de son maître (Genèse 24: 14). Il nous est dit que Ruth, la Moabite, est entrée «fortuitement» dans le champ de Boaz (Ruth 2: 3). Mais ce n'était pas un hasard au sens courant du terme; c'est manifestement Dieu qui l'avait dirigée là, c'est ce qu'il avait prévu pour elle. Là, elle a appris à connaître celui qui deviendrait son Époux, Boaz. De nos jours, beaucoup de nos jeunes frères et sœurs apprennent à se connaître à des conférences bibliques, ou lors de visites dans des assemblées, ou de toute autre façon qui paraît fortuite, mais dont Dieu se sert pour diriger les siens. Que votre cœur, chers jeunes enfants de Dieu, se repose dans son amour et se confie paisiblement en lui! Il a un chemin pour chacun des siens; tous les moyens sont dans sa main; son désir n'est que votre bénédiction. Marchez dans sa lumière.

Ce que Dieu a fait (Genèse 2: 22)

Ce qu'il a fait, c'est ce qu'il peut et veut encore faire aujourd'hui. Après avoir créé la femme qu'il destinait à Adam, après l'avoir formée de la façon la plus étonnante et la plus merveilleuse, Dieu «l'amena» lui-même vers l'homme. Ce Dieu qui a appelé les mondes à l'existence, le Dieu tout-puissant, n'a pas hésité à amener personnellement vers Adam sa future compagne. C'est comme s'il voulait prendre part à la joie qu'allait éprouver Adam lorsqu'il verrait sa femme pour la première fois et qu'il la recevrait comme un don de sa main. D'innombrables croyants en ont fait l'expérience et peuvent déclarer avec bonheur: Dieu m'a amené la femme ou le mari qui me convenait. «Trois choses sont trop merveilleuses pour moi, et il en est quatre que je ne puis connaître: le chemin de l'aigle dans les cieux, le chemin du serpent sur le rocher, le chemin d'un navire au cœur de la mer, et le chemin de l'homme vers la jeune fille» (Proverbes 30: 18, 19).

Ce que Dieu a ordonné (Genèse 2: 24)

Nous avons ici comme la «loi fondamentale» du mariage, valable pour tous les temps, tout particulièrement pour l'époque chrétienne. Elle est pour le bonheur et pour la bénédiction des Époux, pour un mariage harmonieux. Il ne faut pas la transgresser. Ceux qui le font néanmoins devront faire la tragique expérience que la désobéissance envers Dieu conduit au malheur. Par contre, ceux qui s'en tiennent à la règle divine feront l'expérience que Dieu récompense et bénit ceux qui lui obéissent.

Dans le verset 24 de Genèse 2, nous trouvons aussi un ordre de priorité temporel. En premier lieu, le jeune homme doit quitter son père et sa mère. Cela a lieu dans l'intention de fonder une famille, d'aimer sa femme, de lui porter honneur, de la nourrir et de la chérir (Éphésiens 5: 28, 29; 1 Pierre 3: 7). Cela implique que l'on est libéré de la sphère de l'obéissance dans la maison paternelle et que, par conséquent, les parents laissent aller leur enfant — c'est un point important à signaler. Et puis, il «s'attachera à sa femme». L'attachement dont il est question ici décrit tout un processus. C'est la découverte de l'autre dans l'affection et l'estime; c'est la connaissance mutuelle des caractéristiques et des qualités des futurs Époux. Enfin — et seulement alors — le tout est couronné en ce que les deux deviennent «une seule chair» dans le mariage, cette relation qui signifie l'harmonie la plus profonde quant à l'esprit, l'âme et le corps.

Celui qui ouvre les yeux aujourd'hui sur ce qui se passe autour de lui constatera avec effroi que l'homme a complètement dévié de ces principes divins. Si bouleversante que soit cette évolution dans des pays qui ont un passé officiellement chrétien — elle est prédite dans la parole de Dieu et ne devrait pas nous surprendre.

Les mariages dans l'Ancien Testament — des modèles?

Dans l'histoire du peuple d'Israël, nous trouvons souvent de graves déviations de la pensée de Dieu relativement au mariage, et cela aussi chez les croyants. Dieu l'a toléré, mais ne l'a certainement jamais approuvé. Ainsi, les mariages que nous rapporte l'Ancien Testament ne sont pas toujours un exemple pour nous. Beaucoup d'entre eux sont loin de l'ordonnance divine originelle. Le péché qui est entré dans le monde a pénétré et altéré toutes les relations naturelles dans la création, y compris le domaine du mariage. De plus le mariage était fortement marqué par les us et coutumes de l'époque, comme on le voit par exemple dans l'histoire de Rebecca ou de Ruth.

Il était réservé à une époque ultérieure de discerner toute la sagesse de Dieu contenue dans cette institution. La révélation de cette sagesse a commencé lorsque le Seigneur Jésus lui-même, dans son enseignement, a replacé le mariage à sa place originelle. Comme chrétiens, nous sommes appelés à ennoblir de nouveau cette institution, en nous souvenant que Dieu aimerait y voir quelque chose qui reflète l'union de Christ avec son épouse. C'est ce qui nous est révélé dans l'épître aux Éphésiens, où le passage de Genèse 2 est appliqué directement à la relation de Christ avec l'assemblée.

Un triste déclin

En rapport avec la déviation des principes divins, nous voulons citer, pour notre instruction et notre avertissement, l'exemple d'une famille de l'Ancien Testament, dans laquelle, en l'espace de quatre générations, nous pouvons observer un terrible déclin relativement au mariage.

Dans la communion avec Dieu, Abraham avait saisi beaucoup de la pensée divine au sujet du mariage. C'est pourquoi, lorsqu'il charge son serviteur d'aller chercher une épouse pour son fils Isaac, il lui enjoint expressément de ne prendre en aucun cas une femme parmi les Cananéennes. Le serviteur doit aller la chercher dans la parenté d'Abraham, là où il y a la connaissance du vrai Dieu. En d'autres termes, l'épouse doit appartenir à «la famille de la foi». De plus, le patriarche a confiance que «le Dieu des cieux» conduira son serviteur pour trouver la femme qu'il destine à son fils. Abraham tient absolument à être en accord avec Dieu et à lui laisser le choix. Il ne veut — pour employer le langage du Nouveau Testament — qu'un mariage «dans le Seigneur».

Chez son fils Isaac, nous remarquons déjà un certain affaiblissement. Il n'a pas les convictions et l'énergie de son père. Esaü, le fils aîné d'Isaac, prend deux femmes appartenant au peuple des Héthiens. Elles sont «une amertume d'esprit pour Isaac et pour Rebecca» (Genèse 26: 35), mais nous ne voyons pas que le père ait blâmé son fils pour ces mariages ou qu'il s'y soit opposé — ce qu'Abraham aurait certainement fait. Ce dernier ne manquait pas de commander à ses fils de garder la voie de l'Éternel (Genèse 18: 19). Quant au mariage de Jacob, le deuxième fils d'Isaac, l'Écriture nous rapporte de tristes choses. Si, tout d'abord, il donne suite au désir de ses parents d'aller chercher une femme à Paddan-Aram, le lieu d'habitation de son oncle, il s'unit finalement à quatre femmes et toute sa conduite en cela montre qu'il a oublié les instructions de son grand-père Abraham.

Puis, à la quatrième génération, nous voyons non seulement une déviation ou un oubli, mais un rejet total des principes divins. Juda, l'un des fils de Jacob, épouse la fille d'un Cananéen. Plus tard, il montre un comportement abominable dans une liaison avec sa belle-fille (Genèse 38: 12-23).

Ces récits de la Genèse ne nous donnent-ils pas une image de ce qui est arrivé dans la profession chrétienne telle que nous la voyons aujourd'hui? N'en a-t-il pas été de même, à tous égards, dans l'histoire de l'Église comme témoin de la vérité de Dieu? Au début la fidélité, puis la déviation, ensuite l'oubli, et finalement le rejet total des commandements de Dieu. Que Dieu nous aide à être réellement «le sel de la terre» et «la lumière du monde»! Concrètement, cela signifie qu'il nous faut nager contre le courant.

La parole de Dieu — une lumière à mon sentier

Considérons encore l'enseignement de l'Écriture sur quelques points particuliers.

Doit-on se marier? Cette question a aussi préoccupé les disciples (Matthieu 19: 10-12). Dans sa réponse, le Seigneur présente le renoncement au mariage pour servir Christ — «pour le royaume des cieux» — comme une exception. Paul confirme ce principe et indique qu'une grâce particulière est nécessaire pour cela (1 Corinthiens 7: 7). Le propos de Dieu après la création de l'homme était: «Il n'est pas bon que l'homme soit seul».

Si l'on envisage le mariage, que ce soit avec la condition: «seulement dans le Seigneur» (1 Corinthiens 7: 39)! — c'est-à-dire que cette union puisse trouver l'approbation du Seigneur à tous égards! Cela implique aussi que l'on agit en accord avec les parents, lorsqu'ils sont croyants. Ayons le désir profond de laisser le choix à Dieu et apportons-lui nos exercices dans la prière, avec foi et persévérance. L'attachement est une condition fondamentale, mais il ne doit pas être le seul mobile. De plus, l'attrait pour la beauté extérieure n'est pas équivalent à l'attachement. Observons l'ordre de succession tel qu'il est donné en Genèse 2: 24.

Ne craignons pas, si cela est nécessaire et possible, de demander conseil à un frère ou à une sœur expérimentés.

Soyons attentifs à une chose qui est complètement ignorée dans le monde d'aujourd'hui. Selon l'enseignement de l'Écriture, le mariage est un acte public; il doit être traité en conséquence et attesté par une instance officielle. Au temps de l'Ancien Testament, cela était fait par les anciens de la ville — ceux qui étaient assis «à la porte» (cf. Ruth 4: 11) — et cela est fait aujourd'hui par l'office de l'état civil.

Le prophète Malachie, aux «temps de la fin» de l'Ancien Testament, dénonce publiquement les pratiques du peuple qui méprisaient les commandements de Dieu relativement au mariage et à la famille. Plusieurs avaient abandonné ou répudié leurs femmes et Dieu avait vu les larmes de celles-ci. Le prophète reprend sévèrement leur infidélité; «tu as agi perfidement» envers «la femme de ton alliance». «L'Éternel est témoin entre toi et la femme de ta jeunesse» (Malachie 2: 14). Les expressions employées évoquent une alliance solennelle. Dans notre «temps de la fin», les choses sont allées si loin que l'on ne peut que s'étonner de la patience de Dieu. Il se tait encore, mais plus pour longtemps.

Que le Seigneur nous accorde de discerner la valeur qu'il a lui-même conférée au mariage et d'agir en conséquence! Ce sera pour notre bénédiction et pour celle de ceux qui nous entourent. Et si nous devions avoir, en pensée ou en actes, quelque peu dévié de sa volonté telle qu'il nous l'a fait connaître, revenons alors à ce qui était «au commencement».

Ce dont nos mariages ne peuvent être qu'une faible image s'accomplira bientôt sur un plan infiniment plus élevé. Les noces de l'Agneau nous introduiront pour l'éternité dans une bienheureuse et indissoluble union avec «notre Epoux». Dieu y pensait déjà lorsqu'il a prononcé cette parole significative: «Il n'est pas bon que l'homme soit seul».